Le bruit ambiant, de la rue, des voitures, du bus, du café, celui des gens assis là et de leurs conversations… tout ce brouhaha la dépassait. Et puis… et puis…. pouf, juste comme ça, elle s’absenta.
Dans ce monde sourd, aucune présence requise.
C’était un monde finalement plus simple, dans lequel chacun, chacune recevait un nom en fonction de son occupation présente. Elle regardait ainsi les passants passer, les buveurs boire, les serveurs servir, les lecteurs lire, les promeneurs de chiens promener leur chien.
Un ballet d’automates.
D’un geste machinal, elle faisait tourner son portable dans sa main gauche, en pleine pense-errance.
Et si un lecteur se prenait soudain d’intérêt pour la promenade d’un chien, ne serait-ce pas là une chose tout à fait singulière ?! s’amusait-elle. Et le promeneur de chien ne pourrait-il alors pas s’insurger contre cette usurpation, dépossédé qu’il serait de La Tâche sans laquelle il ne pourrait plus prétendre être qui il est si un autre que lui dont ce n’est pas le titre se permettait de promener un chien à sa place !
Tout ceci était vraiment très drôle. Elle passait un excellent moment en sa propre compagnie !
Un klaxon la tira de sa rêverie, la ramenant à sa table, devant son Perrier, avec ses amies et la discussion en cours:
– « Et toi, t’en penses quoi de son nouveau mec ? » lui demanda l’une d’elles.
– « Qui ça, le lecteur qui promène un chien ? »