Fantôme poursuite

Episode 7

Harassés par la pluie et le vent, Jack et Mélanie, jeune couple tout juste marié, avancent de nuit, péniblement sur une route mal éclairée vers le manoir écossais qu’ils ont loué, première étape de leur lune de miel, repos bien mérité, après une année de préparatifs d’un mariage auquel ils avaient souhaité donné le faste d’une bourgeoisie consciente de son côté nouveau riche, désireuse de s’acheter une tradition familiale comme on rajoute une particule à son nom, pour faire chic, à l’image de cette superbe Jaguar qui progresse dans une épaisse obscurité que les cartes peinent à déchiffrer,

jusqu’au moment où au loin, Mélanie en est sûre : « des lumières brillent, Darling chéri » comme elle aime ponctuer ses adresses à Jack qui déjà se dirige, guidé par l’intuition de sa moitié, dans la direction des lumières qu’il distingue maintenant lui aussi, signe d’un foyer qui les attend, chaleureux,

de loin du moins, car en se rapprochant le sinistre des lieux préoccupent les jeunes amants qui paraissent à présent pressés de mettre cette étape du voyage derrière eux, et alors que Mélanie commençait à rassurer Jack sur ses inquiétudes vis-à-vis de l’accueil de ces lieux, un cri glaçant épouvantable retentit, qui ajouta la panique à l’envie d’être ailleurs, et se répéta toujours plus près de leur véhicule, à tel point que, saisie d’horreur, Mélanie attrapa Jack par le bras qui lui, s’agrippait à son volant et enfonçait son accélérateur sur le plancher,

lorsqu’il aperçut dans le rétroviseur une forme éthérée, fantôme aristocratique, lancé à leur poursuite et hurlant son intention de perdre les visiteurs qu’il terrorisait, tant et si bien qu’en entendant une fois de trop le cri du fantôme, Mélanie dévia le bras de Jack qui braqua violemment sur le côté, filant sur quelques mètres de terre boueuse avant de s’encastrer dans un tronc d’arbre qui fendit tout l’avant de la voiture et éjecta brutalement Jack à l’extérieur, transpercé de mille éclats du pare-brise, la colonne vertébrale tordue, comme rompue par la folie des grandeurs.

Tous les épisodes sont également publiés sur Instagram sur le hashtag #mortdesecondroledanslesannees80. D’autres histoires autour des œuvres d’Invader sont sur la voix de l’art urbain.